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Question de M. Olivier Paccaud (Oise - Les Républicains-A) publiée le 21/03/2024

M. Olivier Paccaud attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement sur les modalités de sanction des communes n'atteignant pas le taux de 20 % de logements sociaux. Alors que le Gouvernement envisage d'importantes évolutions sur la législation relative aux logement sociaux, il souhaiterait attirer son attention sur la très grande sévérité dont font preuve les services de l'État à l'égard de communes qui sont toutefois proactives en matière de construction de logements sociaux.
Nous en trouvons une illustration particulièrement frappante dans son département de l'Oise, où la commune de Verneuil-en-Halatte s'est vue infliger une pénalité de presque 50 000 euros. Son tort ? Ne disposer sur son territoire que de 13 % de logements sociaux au lieu des 20 exigés par la loi. Cette appréciation occulte la réalité des efforts que Verneuil - comme tant d'autres communes françaises - consacre à se conformer à la loi.
Quel est l'intérêt de sanctionner une commune de 5 000 habitants qui ne comptait que 2 % de logements sociaux au moment où la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (loi SRU) est entrée en vigueur et qui, depuis lors, a veillé à ce que plus du tiers des nouvelles constructions soient des logements sociaux. Sanctionner par de lourds prélèvements pécuniaires des communes, qui emploient par ailleurs des centaines de milliers d'euros de leurs ressources à des aménagements préparatoires indispensables à l'agrandissement de leurs parc sociaux (voirie, acquisition de terrains, etc.), est une injure faite à la bonne volonté des maires.
Car, sauf à abdiquer tout bon sens et urbaniser leurs communes de façon anarchique, les édiles ne peuvent atteindre cet objectif que de manière progressive et linéaire. Cela suppose donc de leur laisser le temps d'étaler cet objectif sur une trajectoire pluriannuelle. On ne saurait attendre d'eux qu'ils fassent sortir de terre des centaines de logements sociaux d'une année sur l'autre. Il serait donc plus conforme à l'esprit de la loi « SRU » d'apprécier les efforts des communes non pas à l'aune du taux réel de logements sociaux mais relativement à la part de logements sociaux parmi la totalité des nouvelles constructions sur une période donnée. Sans rien dire de l'arbitraire préfectoral en la matière, tantôt indulgent avec une commune, tantôt intraitable avec une autre, cette situation lui parait profondément inique et contre-productive.
À l'heure où l'injonction à la mixité sociale se conjugue à celle de la sobriété foncière, et alors que les ressources financières des collectivités sont plus contraintes que jamais, il lui demande s'il laissera cette aberration se perpétuer.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement publiée le 10/04/2024

Réponse apportée en séance publique le 09/04/2024

M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, auteur de la question n° 1172, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement.

M. Olivier Paccaud. Monsieur le ministre délégué, alors que le Gouvernement envisage d'importantes évolutions sur la législation relative aux logements sociaux, je souhaite appeler votre attention sur la très grande sévérité dont font preuve les services de l'État à l'égard de communes qui sont pourtant proactives en matière de construction de logements sociaux.

Je citerai l'exemple de la commune de Verneuil-en-Halatte, dans mon département de l'Oise, qui vient de se voir infliger une pénalité de près de 50 000 euros.

Son tort ? Elle ne dispose sur son territoire que de 13 % de logements sociaux au lieu des 20 % exigés par la loi. Cette appréciation occulte la réalité des efforts que cette commune, comme tant d'autres, consacre à se conformer à la loi.

À quoi bon sanctionner une commune de 5 000 habitants, qui ne comptait que 2 % de logements sociaux au moment où la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU, est entrée en vigueur et qui, depuis lors, a veillé à ce que plus du tiers des nouvelles constructions soient des logements sociaux ?

Sanctionner par de lourds prélèvements pécuniaires des communes qui emploient par ailleurs des centaines de milliers d'euros et, donc, une large part de leurs ressources à des aménagements préparatoires indispensables à l'accueil de nouveaux logements sociaux - voirie, acquisition de terrains - est une injure faite à la bonne volonté de ces maires.

En effet, sauf à abdiquer tout bon sens et à urbaniser leurs communes de façon anarchique, les édiles ne peuvent atteindre cet objectif que de manière progressive et linéaire. Cela suppose donc de leur laisser le temps d'inscrire cet objectif dans une trajectoire pluriannuelle. On ne saurait attendre d'eux qu'ils fassent sortir de terre des centaines de logements sociaux d'une année sur l'autre.

Il serait plus conforme à l'esprit de la loi SRU d'apprécier les efforts des communes, non pas à l'aune du taux réel de logements sociaux, mais en fonction de la proportion de ces logements parmi les nouvelles constructions sur une période donnée.

Sans même évoquer l'arbitraire préfectoral en la matière, le préfet se montrant tantôt indulgent avec une commune, tantôt intraitable avec une autre, cette situation nous paraît profondément inique et, donc, contre-productive.

Monsieur le ministre délégué, à l'heure où l'injonction à la mixité sociale se conjugue avec celle de la sobriété foncière et alors que les ressources financières des collectivités sont plus contraintes que jamais - la situation pourrait d'ailleurs empirer -, laisserez-vous cette aberration se perpétuer ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Frédérique Puissat. Bravo !

Mme Marie Mercier. Excellente question !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement. Monsieur le sénateur Paccaud, plusieurs mécanismes permettent déjà d'adapter le dispositif SRU aux particularités des communes concernées, en particulier les plus petites.

Le législateur a d'ailleurs renforcé cette logique de différenciation à la faveur de la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite loi 3DS.

Ainsi, le prélèvement supporté annuellement par les communes déficitaires, qui est proportionnel à leur déficit en logements sociaux et à leur potentiel fiscal, est adapté à leur situation et aux efforts qu'elles déploient.

En ce sens, des exonérations de prélèvements sont prévues, notamment pour les 10 000 communes bénéficiant de la part cible de la dotation de solidarité rurale (DSR), sous réserve que celles-ci disposent d'une part minimale de logements sociaux.

En outre et surtout, les communes peuvent diminuer leur prélèvement à hauteur des dépenses qu'elles ont engagées pour la production de logements sociaux, comme le financement d'études ou leurs efforts pour minorer le coût du foncier.

Dans tous les cas, il est essentiel de rappeler que ce prélèvement ne constitue en aucun cas une pénalité. Les sommes prélevées sont versées à l'intercommunalité délégataire des aides à la pierre et réservées à la construction de logements sociaux. Le prélèvement SRU est ainsi l'un des moteurs de la production de logements sociaux dans le pays.

Si toutefois une commune rencontre des difficultés objectives à respecter ses obligations et ne peut être exemptée, elle peut toujours signer un contrat de mixité sociale lui permettant, si sa situation le justifie, d'aménager ses objectifs de rattrapage. (Mme Frédérique Puissat s'exclame.)

Mme Marie Mercier. Ça ne fonctionne pas !

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Cet outil contractuel, qui résulte de la loi 3DS, s'appuie sur un constat partagé avec les services de l'État quant aux difficultés rencontrées au sein du territoire. Il repose sur les engagements précis et ambitieux en faveur du développement du logement locatif social pris par les collectivités signataires.

À l'occasion de l'examen du projet de loi que nous venons de transmettre au Conseil d'État et qui sera débattu au Sénat à la mi-juin, nous pourrons rediscuter des conditions d'application du dispositif SRU dans certaines communes.

Il faudra en premier lieu aborder la question des communes déficitaires et de leur capacité à inclure des logements locatifs intermédiaires dans le processus de rattrapage. Nous discuterons naturellement des sujets que vous évoquez, ce qui laisse présager de beaux débats législatifs !

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